A l’origine presque indissociables des stades de foot, les pistes d’athlétisme attisent aujourd’hui le débat auprès des clubs et des supporters. A l’heure où le football est le sport le plus puissant du monde, il requiert des enceintes qui lui sont entièrement dédiées. Plusieurs supporters nous donnent leur avis sur ces pistes.
« Améliorer significativement la qualité des spectacles – tant sportifs que culturels » tels sont les objectifs de Matignon pour le Stade de France, après les Jeux Olympiques de 2024, en France. Dans cette optique, le Gouvernement souhaite retirer la piste d’athlétisme du Stade de France, inauguré en 1998. Manque de visibilité, des tribunes plus loins du terrain, partage des infrastructures… tant de problèmes auxquels sont confrontés les différents clubs de football, d’athlétisme ou encore de rugby.
Dans cette optique, de nombreux clubs, avec l’appuis des municipalités optent pour une rénovation complète de leur stade, ou même la construction d’une nouvelle enceinte. Ainsi en Ligue 1, le stade Louis II (Monaco), fait figure de résistant avec sa piste. « C’est terrible, décrit Boris, supporter monégasque. J’ai été dans le stade des Queens Park Rangers, Loftus Road, un petit stade de 18 439 places, quand le goal tirait les 6m, je pouvais presque lui mettre une claque *rires*, c’était super. » Les stades anglais ont cette réputation d’être au plus près de la pelouse. Alors quand West Ham quitte Boleyn Ground pour le nouveau stade olympique de Londres, construit pour les JO 2012, les supporters des Hammers font grise mine.
Boleyn Ground (connu aussi sous le nom Hupton Park), l’ancien stade de West Ham United. ©Photo Wikipédia Le nouveau stade olympique de Londres, utilisé depuis 2016 par le club de West Ham. ©Photo Wikipédia
Le stade comporte une piste d’athlétisme de 400 mètres, aux antipodes du fameux « stade à l’anglaise ». Les Anglais utiliseront même le nom de « soulless bowl » (littéralement ‘bol sans âme’) pour qualifier ce type de stade. « Ce stade est une vraie catastrophe pour un club de foot quel qu’il soit et encore plus West Ham qui était (RIP !) un club si particulier de l’East End de London » raconte Olivier qui a eu l’occasion de visiter le stade en 2019.
Le foot au foot, l’athlé de son côté
A l’origine l’association du pré et de la piste d’athlétisme avait pour but de faire des économies. Financières, évidemment, en regroupant tous les clubs au même endroit, mais également en terme de place. Monaco est l’exemple parfait de cette situation. Le stade Louis II accueille le football, l’athlétisme, mais dispose aussi sous sa pelouse, d’une salle de basket et d’une piscine olympique. Puisque sur le Rocher, chaque centimètre vaut de l’or.
Mais aujourd’hui, le foot pèse tant d’argent, que les clubs veulent offrir à leurs visiteurs la meilleure expérience possible. Des innovations high-tech comme la Wifi, mais surtout un certain confort. Cela passe par une bonne visibilité. Ainsi la Juventus quitte le stadio Delle Alpi en 2006 après à peine 16 ans de location pour construire le Juventus Stadium, sans piste d’athlétisme. En Italie où la vétusté des stades fait débat, il reste pourtant plusieurs enceintes avec une piste. « Pour moi la piste fait partie intégrante de l’âme de la Roma et de l’ambiance. Ça ne me gêne pas pour la visibilité » raconte Romain, supporter français de la Roma. Valentin, autre tifoso giallorosso ajoute : « c’est sûr que l’on est moins près des joueurs mais la visibilité est tout de même très bonne, en tous cas je n’ai pas eu de mal à reconnaître les joueurs. Je trouve que la piste aère le stade et ça donne un côté « vieux stade », moi ça me ramène dans les années 90 et j’aime bien«
Alban a aussi visité l’Olimpico à l’occasion d’un derby de Rome : « Tout dépend du placement. Proche de la piste tu ne vois pas les lignes de touche ou de but. Mais plus tu t’éloignes des Curva et moins tu entendras l’ambiance qu’ils mettent, j’étais entre les deux et j’ai passé le match debout pour tout voir » résume-t-il.
Des nouveaux stades consacrés uniquement au foot
Comme à Turin, les villes optant pour des nouveaux stades font rarement le choix d’un stade d’athlétisme. En France, le stade Gaston Gérard (Dijon) a supprimé la piste lors de sa rénovation en 2007. Le nouveau stade Pierre-Mauroy (Lille) peut accueillir toutes sortes de sports, jusqu’au tennis ou même la moto-cross. Pourtant aucune piste d’athlétisme n’a été installée. De l’aveux de Pierre Ferracci, président du Paris FC (pensionnaire de Ligue 2), le stade Charléty « est un stade d’athlétisme qui ne correspond pas, en l’état, à ce qu’on veut. » Si les visiteurs du stade comme Zakarie ne s’en plaignent pas forcément, « ça ne me dérange pas plus que ça je vois plutôt bien en latérale » les dirigeants parisiens aimeraient un stade consacré uniquement au ballon rond.
Passionné des stades anglais, Romain², fait un résumé pour les « anti-pistes » : « Pour moi la piste d’athlé c’est totalement rédhibitoire. Les tribunes sont trop loins du terrain. Esthétiquement c’est une horreur. Et qui dit piste dit stade ovale et je n’aime pas ça. Pour moi l’idéal ce sont les stades britanniques ou avec des particularités comme à Cadix.«
L’athlétisme a la possibilité d’exporter ses pistes sur d’autres surfaces, comme par exemple à Paris, sous l’arc de triomphe lors de la candidature pour les JO de 2012.
Lire : 10 pistes d’athlétisme originales
Beaucoup de stades sont construits en prévision d’une compétition internationale : l’Euro, la coupe du Monde ou autres coupe des Confédérations. Les plus anciens avaient souvent pour vocation d’accueillir des Jeux Olympiques, expliquant les pistes d’athlétisme. Mais aujourd’hui, les nouveaux stades font de plus en plus le choix de délaisser ces pistes qui éloignent les supporters de la pelouse. L’identité d’un club se ressent aussi à travers ses infrastructures. Les enceintes prennent alors ses couleurs, preuve d’une volonté d’affiliation unique au football et s’éloignent du partage des murs avec d’autres sports. Reste que peu de clubs sont propriétaires de leur stade, laissant choix à son détenteur de son utilisation.
Merci à Boris, Olivier, Romain, Valentin, Alban, Zakarie, Romain² pour leurs avis, liés à leurs expériences dans les stades. Vous pouvez d’ailleurs retrouver plusieurs d’entre eux via des articles sur le site, avec leurs histoires dans les différents stades évoqués.
Rubrique : Vos Stades
Pierre Caron
2 réflexions au sujet de “Le stade d’athlétisme, en bout de piste ?”